LE SYMBOLISME

Introduction au symbolisme
Le Vajrayana a recours à un symbolisme très complexe qui peut parfois rebuter les occidentaux quand ils abordent le bouddhisme tibétain et certains préféreront se tourner vers des écoles du bouddhisme dont les représentations symboliques sont plus rares ou plus épurées : l'impression première est parfois qu'on va  se perdre par exemple dans cette iconographie riche de la bouddhéité, des différents bouddhas, bodhisattvas, yidams  ou protecteurs irrités, dont les moudras, postures, attributs divers prennent aussi des significations symboliques.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                 
On peut rappeler que le symbole n'est autre qu'un élément concret chargé d'une signification plus abstraite qui va au delà de l'apparence. Certains symboles sont universels prenant une dimension archétypale, comme celui de la roue ou du vajra ; d'autres pourront peut-être apparaître comme plus "culturels", héritage parfois de l'Inde.
Mais il est important de comprendre que ce symbolisme tantrique participe de ce qu'on appelle "les moyens habiles" qui permettent de purifier, transformer les agrégats du "moi" et les émotions perturbatrices en sagesse. Notre conception du monde résulte des tendances et des poisons de notre esprit, du conditionnement karmique et de l'ignorance. Il n'y a pas de séparation entre le samsara et le nirvana, seulement une différence de perception. Ces "moyens habiles" utilisent le fonctionnement ordinaire de notre esprit pour le transformer : la visualisation des déités de pratique ou Yidams, la récitation des mantras, les gestes symboliques ou mudra permettent peu à peu de transmuter les visions impures de notre existence conditionnée en pures visions, sans toutefois les rejeter, puisqu'en leur nature profonde les agrégats du " moi ", les émotions, sont des qualités de la Nature de Bouddha présente en tous les êtres. Ainsi Les déités ne sont pas des dieux extérieurs mais des archétypes de l'Éveil et les divers symboles qui accompagnent le chemin d'un pratiquant du bouddhisme tibétain permettent  de représenter ce qui est au-delà de toute conceptualisation, capacité de toute façon elle aussi conditionnée par notre existence samsarique.
Ce cheminement n'implique nullement que ce symbolisme en soit " appris " comme un " code " dont on mémoriserait simplement les signes et les significations : il nécessite plutôt une compréhension intérieure de ces symboles à laquelle les instructions d'un lama qualifié pourront ouvrir et dont la pratique permettra peu à peu de percevoir la profondeur par l'expérience méditative.

D'excellents ouvrages existent toutefois sur le symbolisme du bouddhisme tibétain qui peuvent parfois s'avérer utiles :

  •                 Petite encyclopédie des Divinités et symboles du bouddhisme tibétain pat Tcheuky Sèngué (Editions Claire Lumière) : comme son nom l'indique l'ouvrage le plus encyclopédique des trois proposés ici
  •                 Symboles bouddhiques et culture tibétaine par Dagyab Rinpoché (Editions Kunchab) : ouvrage excellent pour rattacher les principaux symboles à la pensée philosophique
  •                 Vers l'Art sacré du Tibet par Nathalie Gyatso (Editions Claire Lumière) : ouvrage davantage axé sur la conception artistique des représentations sacrées où la personnalité de l'artiste disparaît derrière des conventions et un codage précis des formes.

LE SYMBOLISME UNIVERSEL DE LA ROUE

La roue est un symbole universel qui se rattache à la figure du cercle. Elle se rapporte au monde du devenir et à tout ce qui induit l'idée de cycle, de recommencement ou  de renouvellement.
Dans beaucoup de traditions, elle représente le monde avec 4 rayons qui  évoquent les 4 directions de l'espace; il est aussi à noter qu'elle peut parfois avoir 6 ou 8 rayons comme dans le bouddhisme tibétain selon ce qu'elle est censée symbolisée. On sait que le cercle ou roue est une des figures de base des mandalas : nous ne nous attarderons pas pour le moment sur les  mandalas, pour  revenir à la roue, telle qu'elle est utilisée dans le symbolisme tibétain.
Il existe 3 roues principales :
  • la roue du dharma ou dharmachakra, symbole souvent représenté dans les temples
  • la roue d'or, un des 8 signes auspicieux
  • la roue des existences ou roue de la vie qui constitue un sujet fréquent  sur les thankas

LA ROUE DU DHARMA

La roue du Dharma comporte 8 rayons : elle est le symbole de la doctrine.
On dit que le Bouddha fit tourner 3 fois la roue, ce qui correspond à 3 cycles d'enseignements pour mettre fin à la souffrance (dukkha).
Le 1er tour correspond aux 4 Nobles vérités et à d'autres discours qui sont la base du hinayana, offrant aux aspirants une voie de libération personnelle.
Au 2nd tour, il expliqua comment atteindre la Bouddhéité pour le bien de tous les êtres : c'est la voie du Mahayana qui repose notamment sur les sutras de la Perfection de sagesse et aux enseignements qui ont trait à la nature absolue de la réalité.
Au 3e tour de roue, le Bouddha  a donné des enseignements permettant de concilier ce qui pourrait apparaître comme des contradictions entre les 2 précédents tours.
La doctrine bouddhique n'est pas dogmatique : elle s'adapte aux capacités des différents disciples. On dit que le Bouddha a donné 84000 sortes d'enseignements susceptibles d'être entendus et compris par tous les individus.

La roue du Dharma (dharmachakra) se trouve placée au dessus de la porte des temples ou de l'entrée principale de certains centres comme ici en Bourgogne au Temple des 1000 Bouddhas : la roue est encadrée de deux biches qui symbolisent les disciples. De façon plus ésotérique, ces symboles conjugués représentent les étapes de la voie du tantra du yoga suprême.
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Cette roue a huit rayons comme les huit pétales traditionnels du lotus, et comme l'espace qui a huit directions : on peut y voir aussi aussi un symbole de l'harmonie cosmique.

Les huit rayons symbolisent aussi le "Noble Sentier Octuple", qui mène à la libération et à la cessation de la souffrance :
1. compréhension parfaite
2. pensée parfaite, ou volonté de renoncement, de tolérance et de bienveillance envers tous les êtres vivants
3. parole parfaite, ou volonté d'éviter le mensonge, le bavardage et la médisance
4. action parfaite, ou volonté d'éviter les actions portant atteinte aux bonnes moeurs
5. moyens d'existence parfaits, ou volonté d'éviter toute profession pouvant nuire à d'autres êtres vivants
6. effort parfait, ou volonté de développer en soi ce qui est sain, et d'éviter ce qui est malsain du point de vue karmique
7. attention parfaite, ou attention vigilante à prendre conscience des activités du corps, des sensations, des émotions et des activités de l'esprit
8. concentration parfaite.


                                                                                  

La roue d'or

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Elle fait partie des 8 signes auspicieux qui souvent peints ou brodés sont destinés à favoriser des conditions favorables.

LA ROUE DE LA VIE OU ROUE DES EXISTENCES

Nous abordons ici un élément plus complexe de l'iconographie du bouddhisme tibétain.
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Cette représentation de la roue de la vie ou roue des existences (karmachakra) est très répandue dans les monastères tibétains : elle fait référence aux trois causes de la douleur, aux six formes d'existence ou 6 classes d'êtres, ainsi qu'aux 12 causes interdépendantes.
Elle représente en effet symboliquement les facteurs mentaux perturbateurs, causes de voile et de conditionnement, qui maintiennent les êtres dans le samsara, où ils transmigrent de naissance en renaissance, tant que la libération n'a pas été réalisée et qu'ils n'ont pas atteint le parinirvana.
Le karma à l'origine de la douleur apparaît sous l'action de ces facteurs perturbateurs qui troublent ainsi l'esprit. L'enseignement du Bouddha  permet  de s'en affranchir.

Le samsara est représenté par 4 cercles concentriques, dont la symbolique repose sur l'idée de cycle.

C'est Yama, le Seigneur de la mort, qui le tient dans ses crocs et dans ses griffes ; il a toutefois ici l'apparence d'un protecteur avec :
  •                 Un diadème de 5 crânes : les 5 poisons (désir, haine, ignorance, jalousie, orgueil) transformés en 5 sagesses
  •                 3 yeux : la connaissance des 3 temps (passé, présent, futur)
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Le cercle central représente les 3 poisons, les 3 facteurs mentaux qui emprisonnent les êtres dans le samsara :
  •                 l'ignorance ou l'indifférence symbolisée par le porc
  •                 l'avidité symbolisée par un coq
  •                 la colère et l'aversion, symbolisées par un serpent

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Autour de ce cercle central un cercle partagé en 2 parties :
  •                 une partie plus claire (à gauche): la voie de la lumière qui conduit aux renaissances des mondes supérieurs
  •                 une partie plus sombre (à droite): la voie qui conduit aux renaissances inférieures dans le samsara

Le cercle suivant va illustrer ces 6 renaissances possibles dans les 6 mondes samsariques :
  •                 les trois formes d'existence supérieures dans la partie haute : classe des Dieux, des asuras ou demi-dieux et des humains (1-2-6)
  •                 les trois formes d'existence inférieures dans la partie basse : classe des animaux, des prétas ou esprits avides et des enfers (5-3-4)

Ces six sections sont les six royaumes évoqués dans le Livre des Morts ou Bardo Thödol.
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1- Le monde des dieux est dominé par l'orgueil. Ils ont une vie faite de plaisirs et très longue, mais ils sont mortels et sombrent aussi dans la souffrance quand ils arrivent sur leur déclin.
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2-Le monde des humains est dominé par le désir-attachement : notre vie est un mélange de joies et de peines. Mais cette vie, si elle remplit certaines conditions qui permettent de rencontrer le Dharma  devient la précieuse existence humaine.
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3-Le monde des pretas ou esprits avides est dominé par l'avidité qu'ils ne peuvent jamais satisfaire et ils souffrent sans cesse de la faim et de la soif. Sur le thangka, ils sont représentés, dénudés, c'est-à-dire démunis de tout.
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4-Le monde des enfers est celui d'intolérables souffrances provoquées par un karma négatif résultant de la haine.
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5-Le monde des animaux est dominé par l'opacité mentale : ils souffrent  de la peur, de l'asservissement, du froid, de la faim …
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6-Le monde des asuras ou demi-dieux, bien que supérieur à celui des humains est dominé par la jalousie. Ils passent leur vie en querelles et en douloureuses guerres.
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Nous ne percevons, bien sûr, que le monde des animaux et notre propre monde, humain, et certaines personnes auront du mal  à adhérer à cette croyance de l'existence  de 4 autres classes d'êtres invisibles pour nous : peut-être faut-il alors penser que notre propre fonctionnement mental traverse ces états de conscience dominés tantôt par la haine, l'avidité, l'opacité mentale, tantôt par le désir-attachement, la jalousie ou l'orgueil. Ils plantent des " graines " propices au développement de certains karmas négatifs en créant des conditions favorables qui entraîneront les souffrances correspondantes, soit dans cette vie, soit dans les suivantes.

Le dernier cercle extérieur est découpé en 12 cases qui correspondent aux 12 causes interdépendantes :
1.l'ignorance, symbolisée par l'aveugle au bâton : c'est la non
                compréhension de la véritable nature de la réalité
2.les impulsions ou formations karmiques, symbolisées par le potier :
                elles déterminent des tendances de l'esprit
3.la conscience de base ou continuum mental : son agitation est symbolisée par un singe dans un arbre qui saute de branche en branche. Les formations karmiques vont pouvoir s'y déposer et s'y développer dès que les conditions seront favorables
4.le nom et la forme, symbolisés par un homme dans une barque : lorsque nous nous incarnons, c'est l'apparition d'une forme que l'on peut nommer. Cette forme fait partie des 5 agrégats (forme, sensation, perception, volition et conscience) par lesquels nous aurons la conscience illusoire d'un " moi "
5.les 6 consciences sensorielles, symbolisées par une maison à six fenêtres : tactile, visuelle, gustative, olfactive et auditive, liées aux organes physiques, et une mentale.
6.le contact symbolisé par un homme et une femme : il apparaît dès que les 6 consciences sensorielles sont créées
7.la sensation, symbolisée par une flèche dans l'œil, peut être agréable, neutre ou désagréable
8.le vouloir ou désir (la soif), symbolisé par une personne en train de boire
9.la saisie et l'attachement, représentés par un singe cueillant des fruits.  L'esprit "se crispe" sur un objet pour tenter de le maintenir ou de le rejeter
10.le devenir symbolisé par une femme enceinte : à cause de la saisie une cause karmique a été créée qui se manifestera dans le futur par un état de renaissance
11.la naissance représentée par une femme qui accouche : elle résulte du karma accumulé
12.le vieillissement et la mort symbolisés par un vieil homme qui porte un cadavre : avec l'apparition d'une forme, viennent inévitablement la vieillesse et la mort

Chaque individu existe depuis des temps sans commencement et peut, conditionné par tous ces facteurs, passer d'une existence à une autre, heureuse ou malheureuse.
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MAIS CE N'EST PAS UNE FATALITE : à droite au dessus de la roue, le Bouddha montre la Voie du Bouddhadharma
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Cette voie conduit à la libération et aux Champs purs des Bouddhas dont Déwatchen en est l'exemple le plus connu :


" Tous les Tathagatas aussi nombreux que les sables du Gange, dans les dix directions, louent tous ensemble les qualités divines et les vertus inconcevables du Bouddha de lumière infinie. Tous les êtres vivants qui entendent son nom, y croient et en éprouvent du bonheur, parviennent alors à l 'unité de l'esprit. D'un coeur sincère ils se mettent à souhaiter la renaissance en cette terre et obtiennent d'y transmigrer dans l'état où l'on ne revient plus en arrière ".

                                          Extrait du grand Soutra du Bouddha de Lumière Infinie
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