"DORJE" en tibétain ou "Vajra" en sanscrit : le diamant.
Un symbolisme riche : Cela désigne un objet liturgique du bouddhisme tantrique. Il est associé au symbole féminin que constitue la cloche (ghantâ). Le bouddhisme tantrique porte ainsi le nom de Véhicule du diamant ou "Vajrayana". Comme le diamant, il symbolise ce qui reste quand les apparences samsariques ont disparu, indestructible comme la vacuité et limpide comme la pureté parfaite. C'est une image de l'enseignement du Dharma et de la stabilité de la méthode qui permet de parvenir à la sagesse.
Le symbolisme du Vajra croisé ou double Dorjé représente ainsi la vacuité, rappelant la nature éternelle de l'esprit éveillé autant que celle de l'enseignement. Il symbolise aussi l'activité de la vacuité, qui détruit toute négativité ; en ce sens, il se trouve associé à la 5e famille de bouddha, la famille « karma », autrement dit « activité ».
C'est aussi la raison pour laquelle ses 4 séries de 5 branches sont interprétées comme symbolisant les 4 types d'activité éveillée :
l'activité qui apaise les perturbations internes et les conflits
l'activité qui accroît le mérite et les richesses
l'activité qui assure le pouvoir pour le bien des êtres
l'activité violente pour assurer le bien de tous les êtres
Pour connaître le symbolisme des 5 familles de Bouddhas, cliquez sur le double Dorjé :
Pour lire dans les apparences comme dans un livre, c'est en ton propre esprit que tu dois étudier. Milarépa
Introduction générale : L'origine et le développement du bouddhisme par Lama Trinlé
Introduction générale : L'origine et le développement du bouddhisme Contexte historique et géographique Contribution au forum de l'Unipaz à Brasilia en juin 2000
" Les expériences des êtres vivants résultent de leurs comportements, Ceux-ci dépendent de ce qu'ils sont devenus "
La vie du Bouddha Né dans une région au sud du Népal, au 5e siècle avant J. C., le jeune prince Siddhârta vécut la première partie de sa vie dans le luxueux confort de la vie protégée du palais. A l'occasion de quelques sorties il fit quatre rencontres :
un malade
un vieillard
une personne décédée
un religieux
Elles l'amenèrent à s'interroger sur le sens de la vie. Réfléchissant à son impermanence, il considéra sa manière de la vivre comme insatisfaisante. Aussi quitta-t-il son palais, à l'exemple des religieux de son temps, pour entreprendre une quête spirituelle en adoptant le mode de vie d'un ascète errant, se livrant à la contemplation. Il commença par étudier auprès des plus grands maîtres contemporains, puis, toujours insatisfait, il poursuivit seul sa recherche se consacrant durant 6 années à une ascèse rigoureuse. Renonçant finalement à cet autre extrême qui était à l'opposé de sa vie de confort au palais, il se rendit à Bodh-Gayâ, dans l'Inde centrale, où il atteignit le parfait éveil. Les trois joyaux A la suite des requêtes qui lui furent présentées, le Bouddha se rendit à Sarnath, près de Bénarès, où il exposa pour la première fois son enseignement, le Dharma. Il consacra ensuite les quarante dernières années de sa vie à le développer dans différents contextes. Ceux qui ont suivi et mis en pratique cet enseignement ont constitué une communauté laïque et monastique : la Sangha. Depuis cette époque, elle a préservé et transmis la voie de réalisation spirituelle énoncée par le Bouddha. Aujourd'hui cette tradition vivante est parvenue jusqu'à nous au travers de diverses lignées. Les enseignements ont également été transcrits et nous sont parvenus sous la forme de Canons qui regroupent en une collection de textes les exposés originaux et les commentaires successifs rédigés par les grands maîtres des différentes lignées. La diffusion du Dharma A partir du bassin du Gange, cet enseignement se diffusa d'abord en Inde, puis dans le Sud-Ouest asiatique à commencer par le Sri Lanka. Puis ce fut vers le Nord-Ouest, le Népal, la Chine et à partir de celle-ci en Corée et au Japon. C'est du 8e au 12e siècle que le Tibet reçut l'héritage du bouddhisme indien. Il devait le préserver intégralement jusqu'à nos jours. Au milieu du 20e siècle, l'invasion du Tibet par la Chine suscita l'exode vers l'Inde de nombreux tibétains et, parmi eux, de grands maîtres détenteurs de la tradition dont la rencontre nous a rendu cette tradition vivante directement accessible depuis les années 70 en occident. Le contenu de l'enseignement : La vision du monde L'enseignement du Bouddha décrit la vie des êtres comme un état soumis à l'asservissement et à la souffrance et propose des moyens pour s'en libérer et accéder au bonheur, relatif et ultime. Ce passage progressif d'un état à l'autre est comparé à " un véhicule ", un moyen de progression. Dans cet enseignement, on peut distinguer trois niveaux associés à trois motivations différentes. Ces trois niveaux se fondent sur trois perspectives qui servent de bases à trois types d'objectifs, auxquels correspondent également trois catégories de méthode de réalisation.
Le cycle des existences Dans la perspective bouddhique, les possibilités d'existence ne se limitent ni à la vie humaine ni à notre monde, mais sont classifiées en six domaines : trois mondes supérieurs et trois mondes inférieurs. Pour les trois mondes inférieurs on distingue :
les enfers où ceux qui y ont pris naissance éprouve des tortures et les souffrances extrêmes du chaud et du froid.
le monde des esprits avides qui sont torturés par la faim et la soif.
le monde des animaux qui souffrent principalement de la stupidité, de la peur et du fait de s'entredévorer.
Les trois mondes supérieurs sont habités par les humains, les demi-dieux et les dieux :
dans le premier, se trouvent les humains ; ils expérimentent quatre souffrances principales : la naissance, la maladie, la vieillesse et la mort ainsi que de nombreuses insatisfactions secondaires
dans le second, vivent les demi-dieux. Leur passion principale est la jalousie et ils sont animés par des querelles perpétuelles
dans le troisième, les différentes catégories de dieux, bien que jouissant d'une vie longue et comblée, doivent néanmoins, à l'épuisement de leur mérite, retomber dans les mondes inférieurs.
Devoir renaître dans un état ou dans l'autre, selon les actes qui ont été commis, est ce que l'on appelle vivre dans le cycle des existences. Le " moteur " qui l'alimente est illustré par les trois figures au centre de la représentation de " la roue de la vie ": un porc, un coq et un serpent, symbolisant respectivement l'ignorance, le désir et la haine. Les actes, nuisibles et vertueux Sous l'influence de ces trois causes mentales initiales sont accomplis des actes par le corps et la parole ; ils peuvent être vertueux ou nuisibles selon que leur résultat se traduit en bonheur ou en souffrance pour soi et pour les autres. On distingue ainsi :
Trois actes nuisibles par l'esprit :
l'ignorance la convoitise la malveillance
Quatre actes nuisibles par la parole :
le mensonge la médisance, visant à créer la discorde les mots durs ou blessants le bavardage.
Trois actes nuisibles par le corps :
le meurtre le vol l'inconduite sexuelle Les actes vertueux sont leurs contraires :
Pour les attitudes vertueuses de l'esprit
le développement de l'intelligence le contentement, la satisfaction la bienveillance, l'amour et la compassion
Pour les actes vertueux de la parole
la véracité le langage conciliant, visant à favoriser l'entente et l'harmonie un langage aimable des paroles signifiantes et utiles, étant ?
Pour les actes vertueux du corps
la protection de la vie la générosité une conduite harmonieuse dans les relations du couple
Les 12 causes interdépendantes L'expression de ces actes va influencer nos relations avec les autres et notre milieu, déterminant nos conditions d'existence dans cette vie et produire les causes qui vont induire celles des existences futures. Le mécanisme de ce processus d'interaction et de rétroaction est expliqué par les 12 maillons de l'interdépendance qui sont illustrés par les 12 images à la périphérie de la roue de la vie. C'est la loi du karma, ou plus précisément en tibétain "lé-gyou-dré" : "les actes, leurs causes et leurs fruits, ou résultats", qui sert de fondement à l'éthique. Un constat fondamental du Bouddha est que rien ne se produit de soi-même. Tout est le résultat de diverses causes, tant au niveau de phénomènes matériels que dans le domaine des expériences vécues. Il s'en déduit que si l'on veut obtenir un résultat il faut mettre en œuvre la cause qui le produira. D'autre part, si l'on ne souhaite pas expérimenter un résultat, il ne faut pas en produire la cause ! Phénomènes et expériences étant ainsi produits, ils s'inscrivent dans le cycle du temps. Le présent est la résultante de toutes les causes passées et les actes présents deviennent, à leur tour, les causes des expériences à venir. Les causes produisant les phénomènes (objets, expériences etc.) sont multiples mais limitées ; un phénomène donné ne peut donc jamais être permanent. Ainsi un axiome central du bouddhisme est que "tous les phénomènes sont le produit de causes et sont impermanents." Par la connaissance de la loi des causes et des résultats, nous disposons donc de la liberté de déterminer ce que deviendra l'avenir par un choix conscient, intelligent et responsable, de nos actes. Pour résumer le principe de l'éthique, on pourrait dire qu'une activité est dite "vertueuse" lorsqu'elle est orientée vers le bien d'autrui ; elle produira un résultat heureux pour nous et les autres. Une activité "non vertueuse" est basée sur une attitude égocentrique, les passions et les actions qu'elles induisent. Elle produit de la souffrance pour les autres et nous ramènera celle-ci en retour. La tradition vivante ne se résume pas à une philosophie, en des énoncés théoriques plus ou moins vérifiables. Elle a pour objectif de favoriser le développement du discernement individuel associé au développement du sens de la responsabilité ; ceux-ci vont augmenter notre autonomie, notre liberté par rapport aux différents déterminismes. Elle nous aide à mieux nous situer et à choisir plus consciemment et plus volontairement notre destination. Pour cela la tradition bouddhiste met à notre disposition des repères, des méthodes, des moyens pouvant nous aider à mieux comprendre et transformer notre mode d'être et d'agir.
Les trois Voies et leur motivation Comprendre et appliquer les principes de la relation entre les actes et leurs résultats pour éviter de tomber dans les conditions inférieures et bénéficier des joies des mondes supérieurs est en quelque sorte "savoir bien vivre dans le samsara" ! Cela correspond à une motivation de premier niveau : la recherche du bonheur dans des conditions d'existence plaisantes. Elle est tout-à-fait légitime et les fondements de l'enseignement du Bouddha permettent d'y répondre efficacement. Au niveau de motivation suivant, dit du Hinayana, ou petit véhicule, on considère qu'à cause de leur impermanence, même les renaissances heureuses, sont insatisfaisantes. Lorsque les causes ayant produit leur existence seront épuisées, il faudra renaître dans des conditions moins plaisantes. Toutes les conditions d'existence sont comprises comme étant sous le pouvoir des trois types de souffrances : 1-La souffrance manifeste, telle une maladie, un accident corporel produisant une douleur physique ou encore une des souffrances mentales comme les classent les textes : " Ne pas obtenir ce que l'on souhaite, être séparés de ce que l'on aime etc.." 2-La souffrance due au changement d'une expérience plaisante en déplaisante comme un bon repas suivi par une indigestion… Ou encore son manque de durée appelée impermanence. Les causes ayant produit un phénomène arrivant à leur terme, celui-ci également s'achève. 3-Toute expérience conditionnée étant impermanente, elle est par cela même considérée comme insatisfaisante. La perception et la compréhension de ces trois souffrances vont de la plus évidente à la plus subtile. A partir de cette perspective, le but devient donc la recherche de la libération des existences conditionnée ou " samsara " pour accéder au non-conditionné appelé " le Nirvana ". Le chemin qui conduit de l'un à l'autre est appelé la Noble Voie aux huit branches. Les moyens mis en œuvre dans celle-ci se résument en les trois entraînements :
l'éthique
la méditation
la sagesse.
L'image utilisée pour illustrer les moyens permettant ce passage est celle d'un radeau qui permet de passer d'une rive d'un fleuve à l'autre ; ainsi, dans cette perspective, l'objectif du Dharma, l'enseignement du Bouddha, est de permettre le passage de l'existence conditionnée à la libération. Lorsque cette motivation est principalement centrée sur soi-même, devant une quête de libération personnelle, elle est dite inférieure. Elle devient celle de la Voie supérieure, Mahayana, lorsque l'on aspire à atteindre le parfait état de Bouddha afin de pouvoir libérer tous les êtres de la souffrance et de les établir dans le bonheur relatif et ultime. Cette voie est fondée sur l'union de la sagesse et de la compassion. La sagesse correspond à la réalisation de la vacuité de soi et des phénomènes comme étant la vérité ultime et la compréhension de la causalité comme régissant la vérité relative. C'est la combinaison des deux qui permet de développer la Grande Compassion. Celui qui suit le grand véhicule est appelé un Bodhisattva : un aspirant à l'Eveil. Les moyens qu'il utilise pour atteindre son but sont les 6 perfections ou paramitas ; elles peuvent également être classées en les trois entraînements. Ce qui diffère du petit véhicule est la compréhension de la nature de la réalité et la motivation. Sur la base du Mahayana, le Vajrayana, véhicule adamantin ou tantrayana, enseigne qu'au niveau ultime la nature essentielle de l'esprit du Bouddha est identique à la nôtre. Celle-ci a les qualités de Vacuité, Clarté et Non-obstruction. Les moyens de progression y sont enrichis par des techniques de méditation comprenant les phases de génération et d'achèvement et de Yoga faisant participer activement le corps, la parole et l'esprit à la discipline spirituelle. La mise en œuvre de ces méthodes permet d'atteindre en un temps beaucoup plus court le but du Mahayana. Ces trois grands aspects de l'enseignement du Bouddha ne se contredisent pas, mais correspondent plutôt à trois éléments servant de support l'un à l'autre. Une illustration utilisée est celle d'un bol qui correspondrait au Hinayana, l'eau qu'il contient au Mahayana, et le reflet de la lune sur celle-ci au Vajrayana. Bien que ce dernier en donne l'image la plus fidèle, les deux autres sont indispensables pour que son reflet soit possible. L'image montre également que le fondement doit être acquis avant que l'on puisse développer les aspects supérieurs. Ainsi au niveau de l'éthique, les premiers préceptes : ne pas tuer, ne pas voler etc. ont pour objectif de cesser de nuire aux autres. Cette attitude précède naturellement la motivation de contribuer à leur bonheur, ensuite vient logiquement l'aspiration à y parvenir plus rapidement et plus efficacement.
Progression sur la voie L'attitude d'esprit centrale du Mahayana est " l'esprit d'éveil " : la Bodhicitta. Elle est l'essence, le cœur des enseignements ; fondée sur l'amour et la compassion. On considère qu'à l'occasion de vies innombrables tous les êtres ont été nos mères et nous ont traités avec tendresse et bienveillance. Maintenant, sous le pouvoir de l'ignorance, des passions et du karma, bien que souhaitant le bonheur ils produisent leur propre souffrance. C'est donc naturellement que, pour leur retourner leur bonté, on souhaite qu'ils soient libérés de la souffrance et puissent jouir du bonheur relatif et ultime. De même que pour un médecin qui souhaite soigner des malades, il faut d'abord en acquérir les compétences, l'on s'efforce de suivre la voie de l'Eveil afin d'atteindre le parfait état de Bouddha. Sur la base de l'attention, de l'étude et de la mémoire, on développera d'abord une bonne compréhension de la causalité qui sert de base à l'éthique. Pour être efficiente, l'étude, doit être suivie par l'analyse et la réflexion qui permettront d'intégrer et d'appliquer dans le vécu ce qui a été compris conceptuellement. Ces trois étapes sont indispensables pour conduire au fruit ou résultat ; en tibétain on expose la relation entre :
Teu, l'écoute ou étude, associée à la mémoire, Drén, correspondant à la base Shi
Sam, l'analyse et la réflexion, permettant une compréhension conceptuelle correcte ; cette progression correspond à la voie, Lam
Puis c'est Gom, la méditation, conduite et mise en pratique ou intégration dans l'expérience vécue, qui mène au fruit ou résultat Drébou.
Concrètement on s'efforcera donc, tout d'abord d'éviter les actes nuisibles et de pratiquer les actes vertueux. On génère et l'on développe ensuite Bodhicitta de l'aspiration qui sera accompagnée par celle de la mise en pratique comprenant l'application dans les six paramitas ou vertus transcendantes : 1) Le don 2) L'éthique 3) La patience - persévérance 4) L'énergie. Celles-ci vont faciliter l'accès à la 5e paramita : la méditation qui consiste en l'établissement d'un état mental de calme, de clarté et de concentration, dépourvu de toute torpeur et d'agitation. Sur la base du calme mental, " Shiné " en tibétain, on développera un discernement analytique et contemplatif sur la nature du moi et des phénomènes. De celui-ci provient la 6e perfection : la sagesse ou connaissance transcendante qui résulte de la vision supérieure, " lhagtong " en tibétain. La sagesse se réfère donc ici à une reconnaissance, une vision intuitive directe, acquise sur la base de l'expérience méditative. C'est la conjonction de celle-ci avec les 5 autres vertus qui les transformera en " vertus transcendantes ". Du point de vue du but, ou résultat, on parle des deux corps du Bouddha :
le corps ultime ou Dharmakaya
les deux corps formels : le corps de gloire Sambogakaya et le corps d'émanation, le Nirmanakaya.
Du point de vue de la voie, leur réalisation s'obtient par les deux accumulations : celle de mérite ou vertu correspondant à la pratique des 5 premières paramitas et celle de sagesse qui correspond à la dernière. On commence d'abord par pratiquer principalement la première accumulation puis les deux conjointes. La réalisation des deux corps permet l'accomplissement du double bienfait : celui de soi, par la réalisation du corps ultime et celui des autres par la réalisation des deux corps formels.
Relations entre les différents aspects La voie de l'éveil se fonde donc sur la pratique de l'éthique consistant à éviter de nuire aux autres et à soi même ; elle est inspirée par l'amour et la compassion. La méditation, ou stabilité mentale, permet de développer la vision pénétrante qui dissipe l'ignorance qui est la cause initiale de l'existence conditionnée. Comme dans un ciel clair de tous nuages, il n'apparaît pas de pluie ou grêle, la dissipation de l'ignorance s'accompagne de celle des aspects subtils des tendances fondamentales, des passions et du karma. Karma, passions, tendances et ignorance sont comparés à quatre voiles qui recouvrent la nature de l'esprit comme des nuages voileraient le ciel. Dans la progression graduelle, ils sont dissipés successivement allant du karma à l'ignorance la plus subtile. Ainsi en partant de la base, c'est-à-dire l'état d'asservissement dans le cycle des existences et en suivant la voie, qui consiste en la purification des quatre voiles par la pratique des deux accumulations on obtient le fruit : les deux corps du Bouddha. Le but de la voie enseignée par le Bouddha n'est donc pas une forme de " néant " ! Ou de dissolution ! La seule chose qui disparaisse c'est la confusion et la souffrance ! Par contre sont développées en tant que résultat de la pratique des six paramitas toutes les qualités de l'éveil ; l'amour, la compassion, l'intelligence et d'innombrables qualités s'exprimant spontanément pour le bien des êtres.
Quelques préjugés erronés 1) L'existence serait régie par la fatalité ou le hasard. Une conséquence fréquente de ce point de vue est l'acceptation passive des situations, la résignation face aux difficultés, le manque d'aspirations allant au-delà de la survie, l'attachement désespéré envers les biens acquis, la peur de les perdre et une disposition agressive n'hésitant pas à nuire aux autres pour défendre ses intérêts. Cette vision est à l'inverse de la compréhension du karma qui nous explique que tous les phénomènes sont produits par des causes que, par conséquent, l'obtention d'un résultat dépend donc de notre libre choix et de la mise en œuvre des moyens nécessaires. L'esprit d'éveil, de l'autre côté, nous fait percevoir que notre bonheur personnel ne peut être séparé de celui des autres. 2) La vie spirituelle nécessiterait l'abandon de la vie active et le retrait du monde. Il peut parfois être bénéfique de prendre du recul pour se consacrer à temps complet à l'étude ou l'approfondissement d'une expérience. L'objectif central de la pratique bouddhique est, néanmoins, la connaissance et la transformation de l'esprit. Bien des aspects de celles-ci ne peuvent se faire que dans la relation avec autrui surtout du point de vue du Mahayana dont l'objectif est d'accomplir le bien de tous les êtres. D'un point de vue bouddhiste, l'être humain n'est pas considéré comme achevé naturellement, dont la vie et l'activité seraient largement déterminés génétiquement, comme pour les animaux. Son destin n'est pas non plus fixé de manière arbitraire par quelques divinités supérieures. Il est vu comme un être dont le devenir dépend en grande partie de lui-même. Une juste compréhension de son potentiel, et les moyens nécessaires, peuvent lui permettre d'actualiser et de développer des qualités telles que l'intelligence, la créativité, le sens de la responsabilité et de la solidarité. Ces qualités pourront s'exprimer de manière constructive dans tous les domaines de l'existence avec de grands bienfaits au niveau personnel et social.
Spiritualité et modernité : Sa Sainteté le Dalaï Lama Parmi les tibétains Sa Sainteté le Dalaï Lama est sans doute le plus connu surtout depuis son obtention du prix Nobel de la paix en 1989. Sa pensée est bien connue grâce aux nombreux ouvrages qui lui sont consacrés. Pour bien la comprendre, il est néanmoins fort utile d'avoir une certaine connaissance de l'arrière-plan traditionnel dont il est le porte-parole. Dès son premier voyage en occident en 1973, il faisait remarquer qu'il ne voyait aucune contradiction entre spiritualité et progrès matériel. Depuis son enfance il avait d'ailleurs éprouvé un intérêt personnel pour les sciences et les techniques. Il observe néanmoins que le confort matériel à lui tout seul est insuffisant pour assurer le contentement et le bonheur. Ceux-ci dépendent en grande partie du fonctionnement de l'esprit. La connaissance et la transformation de celui-ci sont précisément l'objet du Dharma. Il pense que ces deux sciences peuvent très bien être complémentaires et assurer ainsi à l'humanité le confort et le bonheur aussi bien matériels que spirituels. Il fait remarquer l'interdépendance entre le fonctionnement de l'esprit et le comportement, entre celui-ci et la relation qui s'établit entre les personnes et leurs incidences sur les relations sociales et l'environnement. Il met en évidence l'importance d'un esprit de fraternité et de solidarité. Ces observations et recommandations sont l'expression de l'ancienne tradition spirituelle bouddhique mais sont aussi conformes au bon sens et à la description des faits. Cette référence à l'expérience directe, à la vérification, est une caractéristique du bouddhisme depuis les origines. Il ne fait pas appel à des croyances, des dogmes mais invite à observer, à réfléchir, à examiner, à vérifier à expérimenter par soi-même. Sa Sainteté dit parfois qu'il y a deux types de problèmes : 1) Les problèmes naturels, tels les intempéries, les éruptions volcaniques etc., contre lesquels on ne peut rien faire, si ce n'est les prévenir au mieux et remédier autant que possible aux dommages qu'ils causent. 2) Les problèmes produits par l'homme : " man made problems ". Ceux-là ne relèvent pas d'une fatalité et il ne tient qu'à nous de faire appel à notre intelligence et bonne volonté pour les éviter. Naturel et potentiel L'affirmation que l'homme est " naturellement bon " semble contredite par les faits…Si tel était le cas, pourquoi y a-t-il tellement de conflits, de délits et d'injustices ? Dans le contexte du Dharma, le mot " naturel " ne se réfère pas à une loi biologique, ni à une habitude personnelle, ou encore à un conformisme social intégré par l'éducation. Ici " naturel " signifie " inhérent ", " potentiel ", lié à la nature même de l'objet. Les images utilisées pour illustrer ce concept sont par exemple celles de la présence de l'huile dans la graine de sésame, du beurre dans le lait ou de l'or dans le minerai. On dira ainsi qu'il est possible d'extraire l'or de son minerai mais pas d'une pierre ordinaire, le beurre du lait mais pas de l'eau. On peut nettoyer et faire ressortir la blancheur d'un coquillage mais pas d'un morceau de charbon. C'est donc une référence à la possibilité d'un résultat, après un processus visant à actualiser une qualité qui était potentielle dans la nature de l'élément initial. De même qu'un terrain en friche peut être transformé en jardin botanique, ainsi les qualités humaines peuvent être actualisées par l'éducation, l'apprentissage et l'entraînement. C'est une fois actualisées qu'elles deviendront " naturelles " au sens d'" habituelles " comme la musique pour un musicien, ou la conduite d'une voiture pour un chauffeur expérimenté. Toutefois il ne s'agit pas d'un conditionnement arbitraire ; ces qualités de compassion, d'intelligence sont considérées comme étant un potentiel naturel de l'épanouissement de l'être humain. L'ignorance, la confusion, d'où proviennent une cupidité insatiable et une hostilité malveillante, sont simplement considérées comme un dysfonctionnement, en quelque sorte comme des maladies auxquelles il convient de remédier avec des soins appropriés ! Un facteur déterminant est bien entendu l'éducation. Psychologie - Spiritualité - Religion La valeur de qualités d'esprit telles que la vigilance, le discernement, le sentiment de fraternité, le contentement, le sens de la responsabilité, l'intelligence, la sensibilité, l'amour et la compassion peut être appréciée même en dehors d'un contexte dit " religieux ". Développer celles-ci ne peut que favoriser la liberté, le bonheur et le bien-être individuel et collectif. Ces éléments sont présents dans la tradition bouddhique mais ont une valeur universelle indépendante d'un contexte religieux. Le bouddhisme est une tradition spirituelle vivante très riche et profonde, sa découverte est récente et son potentiel est encore très peu connu en occident. Grâce aux grands maîtres qui en sont les dépositaires actuels, au travers d'une transmission ininterrompue depuis l'époque du Bouddha, nous pouvons la découvrir et en approfondir les richesses. Cette découverte ne se limite pas à un sujet d'étude théorique, mais peut devenir l'expérience vécue d'une tradition vivante. Conclusions Ni le bouddhisme, bien différent des rêves fantaisistes de certains, ni sans doute quoi que ce soit d'autre, ne pourront résoudre miraculeusement tous les problèmes individuels et collectifs actuels. Mais, en attirant notre attention sur l'origine de ceux-ci, l'esprit de l'homme et son fonctionnement ou son dysfonctionnement, en mettant à notre disposition la richesse des moyens de connaissance et de transformation développés au cours de ses nombreux siècles d'expérience, cette grande tradition spirituelle pourrait bien nous aider à progresser de manière constructive. En guise de conclusion, citons ce commentaire de Sa Sainteté le Dalaï lama sur une stance du maître indien Shantidéva : " Nous ne pouvons pas demeurer sur cette planète en permanence, moi le premier. Nous y sommes venus en touristes, et, dans le meilleur des cas, notre séjour durera 100 ans. C'est pourquoi, tant que nous sommes en vie, nous devons avoir bon cœur, incarner quelque chose d'utile et de positif. Que nous vivions quelques années ou un siècle, ce serait vraiment triste et regrettable d'aggraver les problèmes qui affligent les êtres humains, les animaux et l'environnement. Ce qui compte le plus c'est d'avoir bon cœur. " Lama Trinlé
Le texte du Refuge
SANGYE/TCHEU TANG/ TSHOG KYI/TCHOG NAM LA
Dans le Bouddha, le Dharma, et la Noble Sangha,
DJANG TCHOUB/PAR TOU/DAG NI/KYAB SOU TCHI
Je prends refuge jusqu'à l'éveil complet.
DA GUI/DJIN SOG/GYI PEL/SEU NAM KYI
Par le mérite résultant de ma pratique du don et des autres perfections de vertu,
DROLA/PEN TCHIR/SANGYE/DROUP PAR SHOG
Que je puisse réaliser l'état de Bouddha pour le bien de tous les êtres.
La prise de Refuge 1er enseignement donné par SS le 17ème Karmapa à Tsurphu, Juillet 1998
Je voudrais aujourd'hui vous présenter un court enseignement sur la prise de refuge.
Vous n'êtes pas bouddhistes si vous n'avez pas pris Refuge. C'est la compréhension et l'observance du Refuge qui vous définissent comme étant bouddhistes. Il est dit : “Vous n'appartenez pas au Mahâyâna si vous n'avez pas la Bodhicitta”. Votre pratique ne relève du Mahâyâna que si vous avez développé la Bodhicitta – c'est à dire l'aspiration d'un Bodhisattva. C'est pourquoi vous devez comprendre que la Voie toute entière est inclue dans les principes du Refuge et de la Bodhicitta. Tous les enseignements donnés par le Bouddha Shakyamouni reviennent au Refuge et à la Bodhicitta.
Nous avons dès lors des enseignements sur les racines du Refuge, les préceptes généraux et particuliers et de nombreuses autres instructions concernant le Refuge.
Les Racines du Refuge sont la foi et la compassion : la foi et la confiance dans le Bouddha, le Dharma et la Sangha, et la compassion qui souhaite libérer tous les êtres sensibles de la souffrance.
La Foi dans les Trois Joyaux peut être de trois types :
* La " foi inspirée " est l'inspiration positive que vous éprouvez lorsque vous visitez des lieux de culte où se trouvent de nombreux objets sacrés, ou lorsque vous rencontrez de grands Maîtres, ou que vous participez à des réunions inspirées de la Sangha. * La " foi de l'aspiration " est celle que vous ressentez lorsque vous souhaitez être libérés de la souffrance et atteindre la paix des états supérieurs d'existence; vous souhaitez pratiquer de bonnes actions et abandonner les actes négatifs en vue de cet objectif et vous avez confiance en la possibilité d'atteindre ce but. * Vous avez la " foi de la pleine confiance " lorsque vous êtes convaincus que les Trois Joyaux sont vos seuls et ultimes Refuges, et que votre compréhension a fait naître en vous une profonde et sincère confiance dans le Bouddha, le Dharma et la Sangha.
La compassion pour tous les êtres sensibles est le désir de libérer tous les êtres vivants de toutes les sortes de problèmes et de souffrances possibles qui foisonnent dans l'océan du Samsâra. Tous ces êtres ont été mes mères, tous m'ont aimé et ont pris soin de moi comme ma mère, et moi, personnellement, je veux les aider à être libérés de toute souffrance. C'est cela la compassion.
Ce sont les racines du Refuge.
Quelle est l'Essence du Refuge ? C'est savoir que je n'ai pas d'autre guide ultime que le Bouddha, pas d'autre véritable chemin que le Dharma, pas d'autres compagnons pour m'accompagner sur ce chemin que la Suprême Sangha. Nous avons besoin de compagnons avec qui cheminer, nous avons besoin d'un batelier pour traverser la rivière : le bateau ne bougerait pas de lui-même. Si nous nous appuyons sur de mauvais amis, nous allons nous égarer, c'est pourquoi nous voulons trouver les bons compagnons et voyager ensemble sur la bonne route. C'est la suprême Sangha.
C'est ce type d'engagement clair et immuable dans les Trois Refuges qui est nécessaire.
Les instructions pour observer les Engagements du Refuge sont nombreuses et peuvent être classifiées en générales et particulières.
* La première des instructions générales est de ne pas abandonner votre Refuge, même au prix de votre vie ou contre une grande récompense. Si quelqu'un entassait d'un côté un monceau de richesses et vous disait qu'il vous appartient si vous abandonnez votre Refuge, vous ne devez pas l'abandonner; même pas pour sauver votre vie. * La deuxième instruction spécifie que vous ne devez vous appuyer sur rien d'autre que les Trois Joyaux, quelles que soient les souffrances et les difficultés par lesquelles vous passez. * La troisième instruction concerne les offrandes que vous ne devriez cesser de faire aux Trois Joyaux et aux objets sacrés du corps de la parole et de l'esprit. * La quatrième instruction vous enjoint de non seulement observer vous-mêmes le Refuge, mais d'aussi conduire autrui autant que possible à prendre Refuge dans les Trois Joyaux. Il ne suffit pas de respecter vous seuls les préceptes du Refuge, efforcez-vous également de conduire les autres dans la même direction. Si vous voyez quelqu'un s'engager dans une mauvaise direction, essayez de le guider sur la bonne voie. * La cinquième instruction vous invite à vous prosterner devant les Bouddhas des dix directions, devant le Bouddha de la direction dans laquelle vous allez. Cela signifie que vous rendez hommage aux Bouddhas, matin, midi et soir.
Viennent ensuite les instructions concernant les préceptes particuliers relatifs aux Trois Joyaux.
* Tout d'abord, si vous prenez Refuge dans le Bouddha, ne prenez pas comme Refuge ultime des divinités mondaines et des dieux tels que Brahma, Indra, Vishnu et Shiva, Tsens ou Gyalpo. Ils sont eux-mêmes toujours dans le Samsâra, comment pourraient-ils dès lors vous aider à vous en libérer ? C'est pourquoi il est dit dans les " 37 Pratiques des Bodhisattvas " qu'on ne devrait pas les prendre comme Refuges. * Deuxièmement, prendre Refuge dans le Dharma signifie cesser de nuire aux êtres vivants. Quand on parle d'être sensibles, il ne s'agit pas seulement des quadrupèdes ayant une fourrure, mais de tous les êtres qui ont un esprit et sont pourvus de sens. On doit cesser de tuer et de voler et s'efforcer de s'engager sur la voie de la non-violence. * Troisièmement, en prenant Refuge dans la Sangha, vous ne devriez pas passer votre temps avec de mauvais compagnons. De mauvais amis vous entraîneront sur des voies négatives et non sur des voies positives.
En ce qui concerne l'hommage aux Trois Joyaux, il faut observer trois préceptes.
* Premièrement, en ce qui concerne le Refuge dans le Bouddha, vous devriez témoigner du respect pour les Bouddhas et leurs représentations. Placez les images du Bouddha dans un endroit qui témoigne de votre respect et faites des prosternations et des offrandes. * Deuxièmement, prendre Refuge dans le Dharma implique que vous témoigniez du respect pour le Dharma et ses représentations, c'est à dire même pour une syllabe ou une lettre par laquelle le Dharma est transcrit, et donc aussi bien sûr pour les livres et les objets du Dharma. * Troisièmement, prendre Refuge dans la Sangha requiert que vous témoigniez du respect pour la Sangha et les représentants de la Sangha, même ceux qui ne font qu'en porter les robes. Si vous trouvez un petit morceau de tissu rouge dans la rue, pensez qu'il représente la Sangha et ne le traitez avec manque de respect.
Trois instructions concernent l'attitude appropriée.
* Tout d'abord, en prenant Refuge dans le Bouddha, faites en sorte que votre esprit soit en accord avec le Dharma. Si vous prétendez prendre Refuge dans le Bouddha mais que votre esprit est complètement en opposition avec le Dharma, ce n'est pas bien. Il faut que votre esprit soit imprégné du Dharma et y faire naître la paix et l'humilité. * Deuxièmement, en prenant Refuge dans le Dharma, votre parole doit être en accord avec le Dharma. Si vous prétendez prendre Refuge dans le Dharma mais laissez votre parole aller totalement à l'encontre du Dharma, vous êtes dans l'erreur. C'est pourquoi efforcez-vous de cesser de mentir, de dire du mal d'autrui ou de proférer des propos blessants. Que vos paroles soient imprégnées du Dharma dans votre vie quotidienne. * Troisièmement, en prenant Refuge dans la Sangha, vous devez faire en sorte que votre corps soit en harmonie avec le Dharma. Efforcez-vous de mener une vie en accord avec le Dharma et abandonnez toute action négative du corps, comme la méconduite sexuelle, etc.(top)
Quels sont les bienfaits de l'observance des préceptes du Refuge ?
Pourquoi prendriez-vous Refuge si cela ne vous apportait aucun avantage ?
* Tout d'abord, en prenant Refuge, vous commencez à pratiquer le Bouddhisme ou Dharma. * Deuxièmement, vous créez une base favorable pour tous les préceptes et niveaux d'ordination. * Troisièmement, vous êtes protégés du mal que pourraient vous faire les humains et les non-humains ; tous les obstacles et les influences nuisibles sont pacifiés. * Quatrièmement, vous ne serez pas séparés des bénédictions des Trois Joyaux dans toutes vos vies à venir. * Cinquièmement, les effets du mauvais karma vont être réduits.
Il y a tant de bienfaits qu'il est difficile de tous le énumérer.
Parlons à présent de la Bodhicitta.
Toutes les pratiques d'un Bodhisattva, sans exception, doivent être accomplies dans le contexte de la Bodhicitta.
D'abord, essayez de penser à tous ces êtres que vous avez vus de vos propres yeux faire l'expérience de grandes souffrances, comme les handicapés et les malades. Pensez ensuite à tous les autres êtres qui passent par des souffrances incalculables. Pensez-y, revenez-y sans cesse jusqu'à ce que vous sentiez pour eux une très grande, très sincère compassion. Vous pensez "Je vais personnellement écarter d'eux toutes ces souffrances, je le ferai même si je dois le faire tout seul.” Quand une telle aspiration, un tel courage naît en vous, vous commencez à devenir un Bodhisattva. Développer la compassion et le courage constituent la préparation et l'entraînement d'un Bodhisattva.
Il y a trois types d'aspiration pour un Bodhisattva.
* La première est " l'aspiration semblable a un roi ". Un roi a le pouvoir et peut donner des ordres pour aider ou donner des avantages à ses sujets. Cela signifie que j'aspire à atteindre l'éveil moi-même afin d'être capable d'aider les autres êtres vivants à atteindre l'éveil. * Le deuxième type est " l'aspiration semblable à un capitaine ", ce qui signifie que je souhaite atteindre l'éveil en même temps que les autres êtres. Le capitaine d'un navire est sur le même bateau que ses passagers, le bateau ne traverse pas seul la rivière. Ce type de sagesse est appelé l'aspiration de la sagesse sacrée. * Le troisième type est " l'aspiration semblable au berger ". Je souhaite que tous les êtres puissent atteindre l'éveil grâce à mes bonnes actions. Je n'atteindrai moi-même l'éveil que lorsque tous l'auront atteint avant moi. Un berger prend soin de ses moutons avant tout, ce n'est que lorsqu'ils sont en sécurité qu'il rentre chez lui. C'est la forme suprême du courage et de la compassion.
De ces trois, c'est la troisième qui est la plus noble mais vous pouvez choisir celle qui vous convient le mieux. : il n'y a pas de différence. (top)
Il y a trois préceptes de la Bodhicitta :
* s'abstenir des actions négatives, * accumuler les actions positives * travailler au bien des autres.
S'abstenir de mal agir peut être développé en 18 préceptes racines mais nous pourrions condenser leur essence à tous dans le fait de ne pas abandonner les êtres sensibles. Abandonner ne fût-ce qu'un seul être est pire que toute autre mauvaise action et c'est pourquoi il faut mettre l'accent sur ce point.
Refuge et Bodhichitta ne sont pas des préliminaires, quelque chose que l'on ne ferait qu'au début pour l'abandonner par la suite. Nous récitons d'habitude les vers du Refuge et du développement de la Bodhicitta au début de nos pratiques, mais nous ne devons pas considérer qu'il s'agit seulement du début. Ces deux engagements devraient nous accompagner tout au long du chemin. Nous devons toujours entretenir la compassion, ne jamais abandonner le moindre être sensible, et un engagement très fort par rapport au Refuge est la base la plus importante du chemin bouddhiste.
“Moi, personnellement, je vais conduire tous les êtres sensibles à l'éveil !” Efforcez-vous de faire naître en vous un tel désir sincère, travaillez-y comme si vous creusiez pour chercher de l'or. Soyez authentiques, sans la moindre fausseté. Si vous n'êtes pas saoul mais agissez comme quelqu'un qui a trop bu, vous n'êtes pas authentique. On doit vraiment ressentir cette aspiration. Nous autres êtres humains sommes avides, de sorte que si nous cherchons de l'or, nous ne pensons à rien d'autre qu'à cet or. Nous devrions avoir la même attitude en nous centrant totalement sur le développement de la Bodhicitta.
Si vous ne comprenez pas le Refuge et son importance, vous êtes incapables de pratiquer le Hinayâna, ne parlons même pas du Mahâyâna. Si vous ne vous sentez pas enclins à la Bodhicitta, vous ne pouvez pratiquer le Mahâyâna, et encore moins le Vajrayâna. Il est essentiel de comprendre ce principe de base.
Si une Bodhicitta authentique est établie dans votre esprit, vous entrerez sur la voie des Bodhisattvas, vous rencontrerez toujours des amis spirituels véritables dans vos existences à venir, vous recevrez le nectar des enseignements du Dharma, vous réaliserez l'Éveil, la parfaite Bouddhéité, sans grand délai. “Parfait” dans ce contexte signifie l'abandon complet de tout ce qui doit être abandonné et le total accomplissement de tout ce qui doit être accompli. “Bouddha” est traduit par “Sangyé” en tibétain. “Sang” signifie “éveillé” : vous vous éveillez de toutes les afflictions. “Gyé” signifie “fleurir, s'épanouir” : la sagesse s'ouvre comme les pétales d'une fleur.
Maintenant que nous avons posé les fondations pour l'océan des activités d'un Bodhisattva, nous devrions réciter des prières comme le Zangpa Tcheupa Meunlam, les prières composées par Nagarjuna, les deux cent prières, le Lopeun Pawo et les 700 prières. Nous ne devrions pas les dire qu'une ou deux fois, mais les réciter quotidiennement, aussi souvent que possible, tout au long de nos vies, pour le bien d'autrui.
Si je parle du Refuge, c'est parce que nous ne devrions pas gaspiller nos vies qui sont dotées des 8 libertés et des 10 richesses. Bien sûr, nombreux sont ceux qui sont plus érudits que moi, toutefois j'ai essayé de dire quelques mots à ce sujet. Un sot comme moi ne sait pas grand chose, mais si vous gardez mes paroles à l'esprit, il en résultera quelques bienfaits.
Je voudrais remercier et témoigner mon appréciation à tous ceux qui ont aidé à sponsoriser le Shedra et qui répandent les enseignements Karma Kagyu dans de nombreux pays. J'espère pouvoir visiter les pays occidentaux dans un proche futur et je souhaite que le Bouddhadharma se répande dans le monde entier. Mes prières vont en ce sens.
Puissiez-vous tous avoir une bonne santé, le bonheur et le bien-être dans cette vie et vos vies à venir. Je fais le voeux que toutes mes bonnes actions des trois temps puissent mûrir au bénéfice de toutes mes mères les êtres vivants et tout particulièrement vous tous. Je vous demande de vous engager dans la non violence et d'abandonner tous les actes nuisibles envers quelque être que ce soit.
Je prie pour que les saisons se déroulent normalement, que les moissons soient bonnes et que tous les êtres sur cette terre jouissent de la prospérité et du bonheur.
En raison de mon jeune âge, je ne suis pas en mesure pour l'instant de vraiment bien servir les monastères et le Bouddhadharma mais je ferai en sorte de ne pas devenir une disgrâce pour ma Lignée dans mes contributions au Dharma et à la Lignée.
Avertissement : Tous les documents mis sur ce site sont mis à disposition pour un usage personnel et ne peuvent être l'objet d'aucune transaction commerciale. Merci aux amis du Dharma qui nous les ont aimablement transmis ainsi qu'à ceux qui les ont diffusés sur le web en accès libre !
Cliquez sur le Lama pour accéder à la page suivante.
MESSAGE AUX AMIS DU DHARMA
Ce site dédié au Vajrayana tibétain ne prétend pas en être une présentation complète. La voie du Vajrayana est avant tout orale et ne se transmet que de maître à disciple de façon très progressive. Il a seulement la vocation, modeste, d'être un site de ressources et d'apporter quelques éclaircissements sur des points importants du bouddhisme tibétain mais qui restent ponctuels. Vous y trouverez des documents textuels, sonores et iconographiques ainsi que des liens parmi mes favoris. Tous mes remerciements à tous ceux qui ont contribué de quelque manière que ce soit à la création de ce site ! Seunam Ouangmo
Si c'est votre 1ère visite, avant de visiter les pages de ce site merci de lire attentivement cet article d'introduction au bouddhisme tibétain que lama Trinlé m'a aimablement autorisée à publier ici. Comprendre l'origine et le développement du bouddhisme permet aussi de comprendre le chemin du Vajrayana qui englobe aussi les autres véhicules, Hinayana et Mahayana.
Glossaire
Actes négatifs (voir karma) :
Les actes créateurs de souffrance et d'obscurcissements
Arhat :
« Celui qui a vaincu l'ennemi des passions », stade de réalisation dans les véhicules fondamentaux du Hinayâna
Bodhicitta (tchangchoup sem [byang-chub sems]) :
L'esprit d'éveil. On distingue la bodhicitta relative ou compassion et la bodhicitta absolue où l'on gagne la réalisation de la vacuité. Dans la bodhicitta relative, on cultive la bodhicitta d'aspiration où l'on engendre la compassion pour autrui par la pensée et les quatre incommensurables, et la bodhicitta de mise en action où l'on met en pratique les six pâramitâ
« Héros de l'esprit d'éveil », terme qui désignent ceux qui cultivent la bodhicitta, c'est-à-dire ceux qui aspirent à l'éveil pour œuvrer au bien des êtres sensibles
Bouddha (sanggyé [sangs-rgyas]) :
Un Bouddha est un être pleinement éveillé. Il a purifié (sangs) toutes les passions et développé (rgyas) toutes les potentialités. L'état de Bouddha donc un état intégral et parfait, dénué de tout conditionnement et omniscient
Calme mental (Shamatha, shiné [zhi-gnas]) :
La pratique de méditation destinée à calmer les pensées par l'attention à un objet de fixation (respiration, lettre, image, etc.)
Corps absolu (dharmakâya, tchökou [chos-sku]) :
La dimension absolue des Bouddhas, ou Corps de vacuité, sans forme ni concepts, d'où jaillissent les Corps formels
Corps de jouissance (sambhogakâya, longtchö dzokpai kou [longs-spyod rdzogs-pa'i sku]) :
La dimension de l'énergie et des qualités lumineuses des Bouddhas, Corps formel hors du temps, aux manifestations variées à l'infini, qui n'est perçu que par les bodhisattvas de la 8ème terre et plus
Corps d'apparition (nirmânakâya, tülkou [sprul-sku]) :
La dimension de manifestation des Bouddhas au niveau des êtres sensibles ordinaires. C'est le second Corps formel, niveau de l'incarnation terrestre des Bouddhas pour enseigner et oeuvrer à la libération des êtres
Dharma (tchö [chos]) :
Terme qui comprend dix sens, dont deux sont essentiels. 1) les phénomènes 2) L'enseignement du Bouddha qui concerne la nature essentielle des phénomènes, la vérité (Buddhadharma), et la voie qui y mène
Karma (le [las]) :
Terme qui signifie « action ». Désigne la loi des causes et des effets quand elle se rapporte à des êtres sensibles. Tout acte est une cause qui sera suivie immanquablement d'un effet de même nature, à plus ou moins longue échéance. C'est l'auteur de l'acte qui en subit les conséquences. Un karma est complet quand l'acte est prémédité, exécuté et ressenti comme satisfaisant par son auteur. Il existe des karmas positifs, neutres et négatifs, selon que l'acte est bénéfique, neutre ou produit de la souffrance. Le karma est le moteur de l'existence samsârique
Mahâyâna (T'ekpa tchenpo [theg-pa chen-po]) :
Le Grand véhicule, qui met l'accent sur la compassion, l'idéal du bodhisattva et la réalisation de la vacuité
Quatre incommensurables (tsémé shi [tshad-med bzhi]) :
L'amour incommensurable, la compassion incommensurable, la joie incommensurable et l'équanimité incommensurable
Refuge (prendre) (kyapdro [skyab-'gro]) :
La prise de Refuge est la pratique d'entrée dans l'enseignement du Bouddha. Le nouveau pratiquant prend refuge dans les trois joyaux (triratna) : Bouddha, le guide ; Dharma, la voie et Sangha, la communauté, comme supports de sa pratique ultérieure jusqu'à l'éveil
Samsâra et nirvâna (khordé [‘khor-'das]) :
Samsâra et nirvâna sont des modes de perception opposés d'une même réalité, selon que l'on est dominé par l'ignorance ou que l'on est éveillé. Mais dans l'absolu, ils sont inséparables. Rejeter le samsâra et aspirer au nirvâna reste un point de vue limité et dualiste. Ainsi, les cinq passions samsâriques sont en réalité les cinq Sagesses, etc. La voie consiste à dissiper l'illusion samsârique et à intégrer les apparences phénoménales à l'état d'éveil. Dès lors, il n'y a plus de différence samsâra-nirvâna.
Sangha (géndün [dge-'dun]) :
« L'assemblée vertueuse ». Au sens ancien, la communauté monastique, au sens large, l'ensemble des pratiquants du buddhadharma. On parle aussi de la sangha d'un maître, formée par le cercle de ses disciples. Dans le tantrisme, on appelle les disciples frères et soeurs vajra
Souffrance (douk ngel [sdug-bsngal]) :
Au sens bouddhiste, la souffrance est un mal-être créé par le décalage de notre existence par rapport à la réalité. Souffrance et mal viennent de ce que l'on rate la cible. La souffrance est donc frustration
Trois Corps (trikâya, kou soum [sku-gsum]) :
Les trois dimensions de l'état de Bouddha, à la fois trois et une : Corps absolu, Corps de jouissance et Corps d'Apparition
Trois Joyaux (Triratna, köntchok soum [dkon-mchog gsum]) :
Les Trois objets de refuge principaux : Le Bouddha, le guide ; le Dharma, le chemin et la Sangha, la communauté
Véhicule (yâna, t'ekpa [theg-pa]) :
Un véhicule est un moyen de parvenir à un but, ou fruit. Les véhicules des dieux et des hommes ne sont pas libérateurs, seuls le sont ceux qui sont « extramondains », et dont le fruit est le plein éveil. Tout véhicule peut être caractérisé par une base, une voie et un fruit
Voie (lam) :
La mise en pratique et le cheminement jusqu'au Fruit, l'éveil. Seuls, les êtres sensibles sous l'emprise de l'ignorance et de la souffrance parcourent la voie. Les êtres éveillés n'ont aucun chemin à parcourir puiqu'ils actualisent directement la base en fruit
Source : Dictionnaire encyclopédique du bouddhisme de Philippe Cornu(Editions du Seuil)
Principes fondamentaux du Vajrayana - Philippe Cornu
Les trois premiers bouddhas avaient laissé un enseignement correspondant à l'aspect des soutras, mais rien selon la perspective tantrique. C'est une approche progressive que l'on appelle aussi "véhicule causal". Notre maître, quant à lui, outre la méthode des soutras, a révélé les doctrines des tantras. Et si l'on sait que les 996 éveillés à venir ne transmettront pas ce dernier aspect, on peut se rendre compte que cette voie qui nous est présentement proposée est extrêmement rare.
Je vous ai fait part de ces quelques considérations afin de vous permettre d'apprécier la valeur de cette relation que nous avons établie avec le Vajrayana. Les doctrines des soutras constituent un cheminement utilisant les causes qui mèneront ultimement à l'éveil, celles ci étant la pratique du refuge, de bodhicitta, etc, tous facteurs qui conduisent petit à petit à la réalisation finale.
Le Vajrayana est appelé "véhicule du fruit" ou du "résultat"; c'est une approche qui se place sous l'angle de l'effet, c'est à dire qu'elle utilise les fruits de la réalisation spirituelle : l'expérience du monde comme mandala et domaine de bouddha et l'expérience des êtres dans leur pure nature divine. Le résultat qu'est l'éveil est vu tel un moyen de progression, le support de pratique sur la voie.
Quand on se demande quelle est la différence entre les soutras et les tantras, le véhicule causal et le véhicule du fruit, la réponse se trouve dans une parole célèbre qui dit que le Vajrayana est caractérisé par la multiplicité des méthodes, par l'absence de difficultés, par le fait qu'il est destiné aux personnes de facultés aiguës et que c'est une voie rapide.
Du point de vue de la réalisation ultime, soutras et tantras sont identiques, néanmoins le Vajrayana se caractérise par des méthodes que l'on ne trouve pas dans les soutras et qui font sa richesse. C'est le premier point. Le second est qu'il s'agit d'une voie aisée en ce sens qu'elle ne recèle pas les difficultés liées, par exemple, au renoncement selon l'approche des soutras. Le troisième point renvoie à une affinité particulière avec son enseignement. Le quatrième veut dire que c'est une voie qui permet d'obtenir l'éveil plus directement. En effet, le véhicule causal, qui est un cheminement par lequel on passe peu à peu par les différentes terres de bodhisattva, requiert un travail très étendu dans le temps, tandis que le véhicule résultant a pour caractéristique spéciale la transmutation. Il offre la possibilité de reconnaître la nature essentielle des passions et des émotions, il n'est pas demandé de les rejeter, de renoncer même à de fortes passions, au contraire du véhicule des soûtras qui requiert de les faire décroître et finalement de les abandonner.
Les tantras sont de quatre sortes : des actes, de la conduite, de l'union et de l'insurpassable union. Les trois premiers assurent un développement très rapide, mais le quatrième propose des méthodes exceptionnelles qui, pratiquées de façon juste, mettent la réalisation spirituelle à notre portée dans cette vie même.
Voyons à présent de quelle manière est pratiqué le Vajrayana. La première chose qu'il convient d'examiner est le pratiquant. Celui ci doit être animé par la motivation du Mahayana, bodhicitta, l'aspiration à l'éveil pour le bien de tous les êtres, le souhait de mettre sa pratique au service de leur bonheur et de leur libération. La nécessité de cette aspiration trouve sa raison dans notre attitude égocentrée. Nous sommes terriblement fixes sur nous mêmes, attachés à notre profit et, en nous engageant dans le Vajrayana par désir d'auto amélioration, nous nous exposons à toutes sortes de déconvenues et d'errances. Il est donc fondamental, lorsqu'on s'apprête à méditer sur les divinités, les champs purs des bouddhas, etc, de ne pas être sujet a cette attitude égoïste.
Cela se fait d'abord par l'égalité de soi même et d'autrui, puis en considérant autrui comme plus important que soi, c'est à dire en inversant l'attitude initiale d'amour de soi : c'est l'échange de soi pour autrui. Cet état d'esprit sous l'influence duquel on considère autrui comme la source de tout bienfait, n'apparaît évidemment pas de façon naturelle. Les exercices destinés à cette transformation se résument dans la pratique de tonglen, "accepter et donner". Cette technique consiste à imaginer que toutes nos vertus, toutes nos joies irradient de nous mêmes vers les êtres des six mondes sous la forme d'une lumière blanche, leur apportant ce qu'ils désirent, et que nous acceptons sans réticence ce qui est douloureux, négatif, ceci prenant la forme d'une matière noire qui est absorbée en nous. En pratiquant ainsi, encore et encore, l'esprit s'accoutume à cette égalité entre soi et autrui puis à ce renversement qui nous fait attribuer une plus grande importance aux autres qu'à nous-mêmes.
Toutefois, en tant que débutant on hésite à donner, attache que l'on est à ce qui est bon, lié par la possessivité et l'avarice. On a peur que la générosité nous prive de tout ! Et comme nous craignons d'être exposés à ce qui nous déplaît, nous devons faire face à un sentiment de refus. Par contre, en accomplissant la pratique avec courage, nous surmonterons cette réticence et passerons au delà des hésitations, de sorte que notre possessivité décroîtra et, avec elle, nos craintes d'être dépossédé de ce que nous aimons. Se développe alors une aptitude toujours plus grande à donner et à accepter qui est le signe de l'état d'esprit de bodhisattva.
Cette détermination à la réalisation du Vajrayana pour le bien de tous les êtres est donc primordiale. Si nous voulions appliquer ces méthodes suprêmes avec l'esprit égoïste qui nous gouverne habituellement, nous ne pourrions accéder au parfait éveil, ainsi que l'illustre un épisode de la vie d'Atisha : celui ci avait auprès de lui un disciple qui, chaque matin, lui apportait le thé ; un certain matin, voici qu'Atisha claque des mains en disant: "Me, aïe, aïe ! " avec une expression d'affliction. Le disciple demande: "Maître, que se passe -t-il ?" et celui ci répond : "Je suis triste car un de mes élèves en Inde vient de s'engager sur une voie erronée." "De qui s'agit-il ?" s'enquiert le disciple; et le maître d'expliquer qu'un pratiquant du tantra de Hevajra s'est fourvoyé. Et au disciple qui s'étonne qu'une des pratiques les plus hautes soit ainsi cause d'erreur, il expose que, bien que s'appliquant au Vajrayana, cette personne a abandonné bodhicitta, l'aspiration du Mahayana, et se trouve de ce fait dans une situation plus mauvaise encore que celle des shravaka tenants du Hinayana qui ne l'ont jamais développée : il pave le chemin pour des destinées douloureuses.
On voit par cet épisode que bodhicitta est aussi le fondement du véhicule tantrique. Pour ce qui est de la pratique proprement dite, on distingue deux facettes : maturation (mine, smin) et libération (dreul, sgrol). La première se réfère aux initiations qui font mûrir l'esprit, et la seconde aux techniques mises en ceuvre sur la base de la transmission établie par l'initiation. L'initiation est un caractère spécifique aux tantras, elle n'existe pas dans le véhicule causal.
Qu'appelle-t-on initiation et quelle est sa fonction ? Notons d'abord qu'il existe différents processus initiatiques en corrélation avec les différentes classes de tantras. Mais, d'une façon générale, l'initiation est ce qui mûrit l'esprit, au sens où le rite fait appel à des éléments symboliques au niveau du corps, de la parole et de l'esprit. Le second volet, le cheminement libérateur qui se développe à partir de l'initiation, comprend deux phases : de génération (kyérim, bskyed rim), et de perfection (dzokrim, rdzogs rim). Dans la phase de développement est engendrée la présence de la divinité ; les méditations débutent par quelques préliminaires pour faire naître une motivation positive, se poursuivent par un moment d'absorption en la vacuité puis, de cette vacuité apparaît la syllabe germe le principe de la divinité sur un lotus et d'autres éléments, enfin, la syllabe germe se transforme en l'apparence de la divinité avec sa couleur, ses attributs, sa position, etc. Le stade de génération est un enseignement remarquable propre au Vajrayana ; en effet, dans le véhicule des soutras lorsque l'on est confronté aux émotions et aux passions, la seule possibilité est d'appliquer quelque moyen pour les combattre ou de les laisser se dissoudre. Ici, on utilise ces pensées en les transformant, on substitue à la pensée ordinaire l'expérience de la sagesse de la divinité ; s'il s'agit d'une émotion relative à l'environnement, la vision ordinaire de celui-ci est remplacée par celle de l'apparence pure du domaine de bouddha ; et à l'expérience ordinaire des sons se substitue celle du mantra. De cette manière sont transformés les contenus impurs de l'esprit en aspects immaculés.
Le caractère intentionnel de cette substitution ne devrait pas nous paraître artificiel : c'est une étape obligée pour que se mette en place le processus de transmutation. On peut expliquer de la façon suivante la différence d'approche entre soutras et tantras à l'occasion de la phase de génération : dans le premier cas, on développe un état d'absorption unifiée qui ressemble quelque peu à la situation dans laquelle un enfant (l'esprit) s'entend dire par sa mère (le méditant) : "Mon petit, maintenant tu restes à la maison ; sois sage, je reviens dans un moment." Que va t-il se passer ? Ça ne va pas lui plaire du tout, à cet enfant, il va commencer à s'agiter, à chercher un moyen de sortir. La contrainte de rester seul lui pèse énormément. Dans la phase de génération du Vajrayana, tout est complètement différent : la mère n'oblige pas son enfant à rester mais, comme la maison est remplie de jouets et de possibilités de distractions, il sera ravi de se retrouver seul, l'idée de sortir ne lui viendra même pas. Telle est la différence.
Pour appliquer cet exemple à la pratique, prenons la méditation de Tchènrézi : si un trop grand nombre de pensées nous obsède, nous nous absorbons dans la notion de la présence de la divinité. Toute la versatilité de l'esprit va alors se déployer dans l'expérience de sa couleur, du mouvement de ses mains, de ses ornements, de ses habits, tous détails qui constituent son apparence. Notre esprit peut ainsi se mouvoir à son gré dans ces pensées qui deviennent celles de l'expérience de la forme de Tchènrézi. Néanmoins, il n'est pas nécessaire de se fixer sur ces divers aspects quand on n'est pas submergé par les pensées. C'est à ce moment l'expérience globale de la vision qui importe.
Il ne faut toutefois pas considérer le stade de développement comme un moyen de "tromper" les pensées ; cette technique a de nombreuses et profondes raisons. Elle permet de dissoudre et purifier les tendances, les imprégnations latentes en notre esprit par suite d'actes antérieurs, de transformer les pensées présentes et de nous introduire, par la vision des êtres comme bouddhas et du monde comme leur domaine, à l'expérience de la pureté fondamentale qui sera ultimement réalisée.
Vous devez surtout retenir que les techniques du Vajrayana ne sont pas un jeu et sont loin de constituer exclusivement des supports d'investissement du processus conceptuel. Après la transformation que nous venons d'évoquer, commence la deuxième phase, d'achèvement ou de perfection, qui est une méditation sans forme au cours de laquelle toutes les apparences créées précédemment disparaissent, se dissolvent. Le stade de développement pourrait susciter une tendance à la fixation, à considérer les apparences engendrées comme réelles, concrètes, et nous faire oublier que ce ne sont là que des symboles, des représentations : d'où la nécessité du stade de perfection. Ce dernier sert à dépasser toute forme de solidification des formes.
Ainsi, la première phase est un moyen de transformer les pensées ordinaires, et la seconde, de dépasser l'attachement qui pourrait s'élever par rapport aux formes engendrées. Quoique la pratique se déroule en deux temps, finalement les deux phases sont pratiquées conjointement, combinées (kyédzok zoungjouk, bskyed rdzogs bzung jug). C'est l'expérience de la luminosité vide (seltong, gsal stong) dans laquelle la luminosité est l'aspect du stade de génération, et le vide, l'aspect du stade de perfection, la conjonction des deux au niveau essentiel. Cette réalisation équivaut à l'obtention de l'état de Vajradhara.
Le Vajrayana est donc cette voie extrêmement profonde et rapide. L'appliquer correctement demande d'être muni de confiance et de dévotion. Ici, la confiance signifie apprécier et se fier aux enseignements tantriques transmis par le Bouddha, ne pas nourrir de doutes ou d'appréhension. Cette confiance authentique doit aussi être présente à l'endroit du lama qui nous introduit à cette voie par l'initiation et nous guide par ses conseils pratiques. Le deuxième aspect requis est le lien d'initiation (samaya, damtsik, dam tshig), la promesse ou engagement attaché à l'initiation. Cet engagement est celui de constamment s'efforcer de transformer les expériences ordinaires de notre corps, de notre parole et de notre esprit, en méditant sur le corps comme la forme de la divinité, sur la parole comme son mantra et sur l'esprit comme le sien. Un troisième aspect est le caractère privé et secret des pratiques, lesquelles constituent exclusivement un travail intérieur qu'il ne convient pas de divulguer et de transmettre à des personnes incompétentes. Une propagation inconsidérée du Vajrayana provoque des incompréhensions qui sont sources de difficultés et d'obstacles.
Qui s'exerce dans ce véhicule sans faillir à ces promesses traversera sans peine les différentes terres de bodhisattva et parviendra à la pleine et parfaite réalisation de Vajradhara. Si vous savez apprécier, et pratiquez avec énergie cette voie suprême, alors une véritable transformation se fera.
Dictionnaire Encyclopédique du Bouddhisme - Philippe Cornu - Édition Seuil